Voici une mise en chronologie des différents traités historiques évoquant le yoga, ou à l’origine du yoga. Je vous invite aussi à faire le lien avec cet autre article de mon site : https://yoga.rabourdin.com/une-cartographie-des-courants-historiques-du-yoga/
Corpus | Contexte | Date | Traité | Auteur | Contenu et lien yoga |
Vedas | Vedisme, hindouisme | env -2000 | Rig-Veda, Sama-Veda, Yajur-Veda, … | révélés (par l’audition, Shruti) et transmis oralement. | rituels, chants, prières ou incantations |
Upanishads | Hindouisme | -800 -500 | Smriti (mémoire) | spéculations philosophiques sur les Védas | |
Brihad-âranyaka-upanishad (abr. Bâ) | Vyasa | première trace du prânayâma qui permet de s’affranchir de la mort (en mettant la main sur ce qu’il y a d’immortel en nous, l’âtman) | |||
le Soi à l’intérieur de l’homme n’est pas différent du principe qui gouverne l’univers, c-à-d le Brahman. Le travail yoguique vise à dégager l’âtman de tous les obstacles qui en empêchent la perception. Le Purusha (= ätman ou Brahman) est entré dans la citadelle de chaque corps. | |||||
Chandogya (abr. Ch) | première trace du pratyâhara (« rétraction des sens ») | ||||
Taittiriya | apparition du terme Yoga | ||||
Svetâshvâtara | mentionne le choix de l’endroit, la manière de s’asseoir, la régulation du souffle, le contrôle des sens et du mental (manas), les phénomènes qui accompagnent et suivent la pratique du yoga, ainsi que la méditation sur la syllabe om. | ||||
Maitrya | six membres du yoga : pranayama, pratyharara), dharana, dhyana, contôle de la fixation sur un seul point (tarka) et enstase (samadhi). | ||||
Bhramavidyâ, Kshurikâ, Nâdabindu, Brahmabindu, Dhyânabindu, Tejobindu, Yogaçikhâ, Yogatattva, Hamsa, Cûlikâ | bases techniques du yoga | ||||
Yoga-Sûtra | Hindouisme | -500 | Patañjali | ||
-300 à +500 | Commentateurs | base théorique et philosophique du yoga, 8 membres du yoga, etc. | |||
Samkhya-Karika | Hindouisme | – 400 | cosmogonie en lien avec yoga-sutras | ||
Mahabharata | Hindouisme | depuis la période védique jusqu’aux environs du VIe siècle apr. J.-C). | dont la Bhagavad gita est un des chapitres | grandes épopées liées à l’hindouisme | |
Ramayana | Hindouisme | depuis la période védique jusqu’aux environs du VIe siècle apr. J.-C). | grandes épopées liées à l’hindouisme | ||
Vedanta | Hindouisme, non vedique | +800 | Adi Shankara | non dualité (atman = brahman) | |
Shiva Sutras | Tantrisme, Shivaisme du Cachemire, hindouisme | +800 | Vasugupta, philosophe shivaïte appartenant à l’école Trika (shivaisme du Cachemire) | indépendant des Vedas, ressemblent à la forme des yoga-sutras | |
Tantras mères | Tantrisme tibétain, bouddhisme | +800 | Bouddhisme tantrique | ||
Hevajratantra | a inspiré les 6 yogas de Naropa | ||||
6 yogas de Naropa | Tantrisme, bouddhisme | +1100 | Naropa | ||
Tantraloka | Tantrisme, bouddhisme | +1100 | Abhinavagupta | évoque la kundalini (le terme apparaît aussi dans certaines Upanishads), tantrisme, shivaïsme, bouddhisme. | |
Hatha-yoga-pradîpika | Hindouisme | + 1500 | Cintâmani | évoque de nombreuses techniques (postures, pranayamas, nettoyages, …) | |
Gheraṇḍa saṃhitā | Hindouisme | +1700 | Gheranda | évoque sept upadeśa ou leçons (sat-karmāni (purification) ; āsana (posture) ; mudrā (position des doigts) ; Pratyâhâra (retrait des sens) ; prāṇāyāma (contrôle de la respiration) ; dhyāna (méditation) ; samādhi (achèvement par l’absorption profonde ou la contemplation) |
- Les Vedas (env -2000) sont un ensemble de textes qui, selon la tradition, ont été révélés (par l’audition, Shruti) et transmis oralement. Elles évoquent des rituels principalement, des chants ou des prières ou incantations.
- Les Upanishads (-800, -500) sont des spéculations philosophiques qui éclairent la partie des Vedas auxquelles elles se réfèrent.
- Les deux plus anciennes Upanishads sont la Brihad-âranyaka-upanishad (abr. Bâ) et la Chandogya (abr. Ch). Le terme de yoga ne s’y trouve pas, mais on y trouve des allusions claires à certaines techniques de yoga. Dans la Bâ, en 1.5.23, on trouve la première trace du prânayâma qui permet de s’affranchir de la mort (en mettant la main sur ce qu’il y a d’immortel en nous, l’âtman) et de s’unir à la divinité (sâ-yujya: union) en l’occurrence Vâyu, âtman de l’univers. Le Bâ (1.5.21) est très instructif sur les origines de la pratique du yoga qui est liée aux spéculations sur le prâna, et l’âtman, éléments éternels en l’homme, et sur la correspondance entre le microcosme et le macrocosme. De même qu’il y a un souffle central en l’homme que la mort ne peut saisir, de même il y a un souffle central qui anime les divinités. De même que le corps et le psychisme humain reposent sur un principe directeur, l’âtman, de même ce grand corps qu’est l’univers repose lui aussi sur un principe directeur, un âtman, qui est essentiellement identique à l’âtman de l’homme. Toute la réflexion upanishadique culmine dans cette découverte : le Soi à l’intérieur de l’homme n’est pas différent du principe qui gouverne l’univers, c-à-d le Brahman. Le travail yoguique vise précisément à dégager l’âtman de tous les obstacles qui en empêchent la perception. Le Brahman habite en l’homme sous la forme de l’âtman: le Purusha (= ätman ou Brahman) est entré dans la citadelle de chaque corps.
- le terme de Yoga apparaît pour la première fois dans son acception technique dans 4 Upanishads du Yajur-Veda noir: la Taittîrîya (2.4), la Katha (2.4, 2.12, 6.12-18), la Svetâshvâtara (abr. Shv.) (2.8-15, 6.12), et la Maitry-upanishad(6.18, 6.3).
- Shv 2.8-15 mentionne déjà le choix de l’endroit, la manière de s’asseoir, la régulation du souffle, le contrôle des sens et du mental (manas), les phénomènes qui accompagnent et suivent la pratique du yoga, ainsi que la méditation sur la syllabe om.
- la Maitry-up mentionne les six membres du yoga (classiquement: 8 !): contrôle du souffle (prânâyâma), rétraction des sens (pratyâhâra), méditation (dhyâna), fixation sur un seul point (dhâranâ), contôle de la fixation sur un seul point (tarka) et enstase (samâdhi).
- La base technique du yoga est déjà largement ébauchée dans les Upanishads du Yoga, qui sont une dizaine environ et qui sont rattachées à l’Atharva-Veda : Bhramavidyâ, Kshurikâ, Nâdabindu, Brahmabindu, Dhyânabindu, Tejobindu, Yogaçikhâ, Yogatattva, Hamsa, Cûlikâ (ce passage provient de Ralph Stelhy, Professeur d’histoire des religions, Université Marc Bloch, Strasbourg).
- Les Yoga-Sûtra de Patañjali et ses nombreux commentaires (-300, + 500), associé au Samkhya Kharika, qui forme un couple parmi les 6 darśanas (points de vue), voir deuxième ligne du tableau.
- Le Mahabharata dont la Bhagavad gita est un des chapitres et le Ramayana, grandes épopées liées à l’hindouisme (depuis la période védique jusqu’aux environs du VIe siècle apr. J.-C).
- Les Shiva Sutras, par Vasugupta, philosophe shivaïte appartenant à l’école Trika (shivaisme du Cachemire) (+800) indépendant des Vedas, ressemblent à la forme des yoga-sutras http://pierre.vergeot.free.fr/les-textes/LES-SHIVA-SUTRAS-Jorand.htm
- Le Hevajratantra (+800) qui a inspiré les 6 yogas de Naropa (+1100).
- Le Tantraloka (le monde du tantra) d’Abhinavagupta (tantrisme, shivaïsme, bouddhisme) (+1000) évoque la kundalini (le terme apparaît aussi dans certaines Upanishads).
- La Hatha-yoga-pradîpika de Cintâmani (+ 1500) évoque de nombreuses techniques (postures, pranayamas, nettoyages, …)
- La Gheraṇḍa saṃhitā de Gheranda (+1700) évoque sept upadeśa ou leçons (sat-karmāni (purification) ; āsana (posture) ; mudrā (position des doigts) ; Pratyâhâra (retrait des sens) ; prāṇāyāma (contrôle de la respiration) ; dhyāna (méditation) ; samādhi (achèvement par l’absorption profonde ou la contemplation)
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